Comme vous l’aurez peut-être noté si vous avez fait partie des rares lecteurs de cet été (je ne vais pas plus sur les sites de statistiques, que je ne monte sur un pèse personne depuis ma deuxième grossesse, je ne suis pas masochiste), je ne suis pas une fan du système scolaire français classique.
Et comme je l’ai déjà évoqué dans le post mis en lien plus haut, je me permets d’autant plus de critiquer que la majorité de ma famille et de ma belle-famille a gagné ou gagne sa croûte dedans.
Que je vous donne cette fois le détail : un grand père directeur d’école qui est allé éduquer en Afrique à trois semaines de trajet de son Berry natal, – pirogue comprise -, marié à ma grand-mère institutrice ; une tante agrégée mariée à un autre professeur et partis en couple éduquer à Madagascar pour perpétuer la tradition familiale ; et enfin une cousine qui s’est « contentée » de la banlieue parisienne, une aventure de nos jours, à ce qu’il paraît.
A qui je peux ajouter mes beaux parents et mes tantes par alliance, enseignants exclusivement haut-marnais.
Ma grand-mère par alliance, par exemple, directrice d’école dans ce beau département, et à qui des parents affolés venaient parler de leur progéniture, est connue pour leur avoir répondu : « Comment voulez vous que moi toute seule j’en fasse un gars intelligent alors que vous vous êtes mis à deux pour en faire un imbécile ? ».
Mon mec aime les femmes de caractère, ça doit venir de là…
Portail de l’école publique de Davron à côté de la mairie.
Et à cette liste, familiale, je pourrais ajouter le meilleur ami de mon père, principal du collège par lequel est passée Vanessa Paradis (on l’appelait cet ami de mon père, « Le Prince », j’étais éblouie).
A l’époque, je me souviens, il avait été le premier à me faire écouter son disque. Et je n’avais pas vu plus d’avenir à cette jeune chanteuse que je n’en avais vu à Jean-Jacques Goldman à ses débuts, je préférais Elsa.
Une amie qui a travaillé et épousé chez Virgin et a sélectionné les musiques pour mes modestes défilés pourrait vous confirmer que j’ai des goûts musicaux contemporains de daube…
Bref, et au risque de me répéter : je me permets d’autant plus de critiquer l’éducation nationale que je suis née dedans. Avec ce type d’argument spécieux, je me permets aussi de tirer à boulets rouges sur les bretons ou la médecine, on appréciera.
Ou pas.
Toujours est-il que j’ai délibérément choisi de ne pas mettre ma fille au lycée français, cohérente en cela avec le fait que je bassine mon mec depuis des années sur mon désamour de l’école publique.
Cette opinion ayant été confirmée par ce premier essai désastreux dans une maternelle de Poissy (coordonnées sur demande) et les conseils d’une coiffeuse du même patelin qui m’a expliqué que tous les ex-expats mettent leur rejetons dans le privé (si au moins la dureté de notre système scolaire se justifiait par sa position dans le monde…), je me suis donc résolue à mettre ma fille dans une école Montessori.
À payer mensuellement les cinq cents euros requis (en moyenne) et à manger des nouilles. Voire pire, à travailler. Pour vous donner une idée du niveau de motivation.
Mais Saint Charlemagne et Saint Ferry aidant providentiellement Saint Flemme, j’ai donc emménage dans le très mignon petit village de Davron.
Où, sur l’insistance de Madame la Maire, nous avons visité l’école et rencontré son institutrice qui y fait aussi office de directrice.
Un vrai coup de foudre.
A Davron, il y a, sachez le, la seule classe unique des Yvelines, depuis la grande section jusqu’au CM2.
Et la maîtresse est une passionnée, au fait de toutes les méthodes, Montessori y compris : j’ai assez vite compris mes limites quand j’ai traversé un couloir de dix mètres de long rempli du sol au plafond d’ouvrages éducatifs.
A Davron, les élèves sont donc élevés dans le respect, l’apprentissage de l’autonomie, et, académie oblige, le respect des programmes.
Et je suis positivement éblouie par la somme de choses que ma fille a apprises en un mois. À bien tenir son stylo, à tracer des ébauches de lettres (elle n’est encore qu’en grande section de maternelle), à apprendre les syllabes, à dessiner et à compter. Et elle fait aussi de l’anglais, de l’initiation musicale, de l’histoire de l’art, du yoga, de la phonologie (kesako ?), de l’analyse de romans et que sais-je encore.
Et la maîtresse se donne encore la peine d’annoter les dessins de ma fille ce qui nous fera un super souvenir pour plus tard.
Bien sûr, pour ma fille, habituée aux cris enthousiastes de ses professeurs Argentins à la moindre velléité de début de tentative d’ébauche de quoi que ce soit, et aux multiples câlins profs-élèves, c’est à dire en résumé, à la chaleur d’Amérique latine, c’est un peu dur de se faire aux objectifs et à l’autorité locale, même compréhensive.
Et les enfants éduqués en Argentine semblent avoir été touchés par une épidémie de « doigts mous » : l’institutrice de ma fille m’a gentiment proposé de lui faire rencontrer une psychomotricienne pour vérifier la dextérité de sa main et une amie – de retour comme nous d’Argentine -, a eu exactement la même remarque pour son petit bout de quatre ans. Un mystère à élucider ! Avec un début de réponse : les Argentins ont l’air plus portés sur l’épanouissement naturel que sur la grosse pince en bois pour muscler les doigts…
Mais en attendant, pour moi, Davron, c’est la preuve qu’une école publique française laïque, gratuite et fantastique, c’est encore possible.
Ma fille faisait tellement la tête à la sortie de la première matinée, que je me suis inquiétée : l’aurait-on à nouveau molestée ?
Rien de tout ça, vous savez quoi ?
Elle ne voulait plus quitter son école !
http://mobile.lemonde.fr/societe/ar…
@MichelG. Merci pour cet excellent lien : qu’une école laïque soit entachée par la morale judéo-chrétienne de l’effort et de la souffrance, c’est tout de même assez paradoxal…
Mention spéciale également au lien en dessous de l’article, sur la culture de classe impitoyable. Sans parler du fait que je me suis incroyablement emm…nuyée entre la sixième et la terminale (et que je cherche encore, à part le français, l’anglais et peut-être l’allemand – soyons généreux -, l’intérêt du savoir acquis), je trouve assez spécieuse l’habitude ancrée par la suite, dans la sélection pour les Grrrrandes Écoles, de traiter les plus grands à la schlague. Un professeur de philo s’amusait à nous classer entre normalement nuls et anormalement nuls et un autre d’histoire nous expliquait que nous étions médiocres au sens latin du terme.
Je cherche encore l’intérêt pédagogique…
Petite découverte fort sympathique d’un blog qui propose des réflexions avec une pointe d’humour. Continuez c’est super.
C’est rigolo et enrichissant de voir comment l’école est perçue.
M’étant renseignée sur l’enseignement en Argentine j’ai un autre élément de réponse : c’est le même système qu’en Roumanie, Italie, Espagne et bien d’autres pays, la maternelle n’existe pas. Ce sont des jardins d’enfants, l’enseignement se déroulant à partir de 6 ou 7 ans. La différence ? C’est un mélange de crèche et d’école maternelle. L’équipe étant là plus pour encadrer que pour enseigner. Découper, coller, colorier, écrire c’est un apprentissage et il est vrai qu’en France cet apprentissage commence dès 3 ans.
C’est pourquoi je bataille depuis des années pour une école où la crèche serait intégrée afin d’arriver plus en douceur vers ces apprentissages, en respectant le rythme de chaque enfant.
Je ne pense pas que l’on manque d’épanouissement personnel (base de ma pédagogie) dans la mesure où la manipulation, le dessin, l’écriture et les activités sportives dont la danse et le yoga permettent d’avoir des outils d’expressions personnelles et de communications non violentes. Mais il est vrai que les câlins sont prohibés surtout à l’école qu’elle soit privée ou publique d’ailleurs.
Petite anecdote, ma première année, j’avais des MS-GS dans une cité difficile avec 250 élèves à surveiller à 3 pendant la récréation. Il y avait des buissons un peu partout dans cette immense cour. Deux élèves se sont cachés derrière les buissons pour une petite découverte corporelle. Au moment de rentrer, je recherche mes 35 élèves dans la foule et je remarque qu’il m’en manque 1. Idem pour ma collègue. Nous les cherchons et nous finissons par les trouver tout nus derrière les fameux buissons. Nous expliquons aux enfants qui faisaient leur propre cour d’anatomie à 3 ans que cela ne se fait pas à l’école et nous les aidons à se rhabiller. Ma collègue oubliant de remettre une culotte sous le pantalon. Nous ne prévenons pas les parents de cet incident ne voyant pas l’intérêt. Le lendemain les policiers ont débarqué à l’école prenant notre directrice, ma collègue et moi pour un interrogatoire, la mère ayant porté plainte pour viol. Après 1 mois d’explications avec des enfants interrogés par la police, l’affaire fut classé avec l’obligation de raser tous les arbres et buissons de la cour!!!!!!!!!! Nous avons été charmés de voir débarquer notre inspectrice en furie nous expliquant par A + B qu’il est formellement interdit d’aider un élève à se rhabiller y compris dans les toilettes. Oui malheureusement je regrette car cette chaleur latine (que j’ai plaisir à retrouver lorsque je vais en Roumanie) serait malheureusement mal perçue en France. La peur des représailles bloquant les rapports humains.
Revenons à notre vie de la classe, pas d’inquiétude à avoir, les cris enthousiastes sont bels et bien présents plutôt deux fois qu’une tout en apprenant qu’il est aussi important de s’auto féliciter, d’être content de soi et de ne pas toujours travailler pour faire plaisir aux autres : cette envie d’apprendre, de vaincre ses difficultés, d’aller vers le mystère, l’inconnu, aimer découvrir ce que l’on ne connaît pas et s’ouvrir aux autres, aux diverses manières de penser et aux diverses cultures. Accepter l’autre, s’accepter et avoir confiance en soi, voilà un résumé de ce que je recherche à transmettre. En espérant que j’y arriverais car j’ai toujours à apprendre, c’est un défi différent chaque année dans la mesure où chaque enfant est différent et "tant mieux sinon ce ne serait vraiment pas marrant" (c’est la fin du premier livre de lecture des CP).
@célia : un grand merci à la Super Maîtresse de ma fille d’être venue témoigner sur mon blog 🙂
Et une idée à creuser : plutôt que de militer pour le retour de la blouse grise, militons pour la légalisation du câlin dans les écoles françaises !!