Pour clore mon chapitre Perito Moreno, je tiens à préciser qu’alors que "mon excellent ami" propriétaire de l’hôtel Los Notros (voir 1.2.3. Nous irons au froid) a eu la possibilité il y a vingt ans d’ouvrir un hôtel dans le Parc national "Los Glaciares", tous ceux qui s’y sont essayé depuis, s’y sont cassés les dents.
Il faut dire que "mon excellent ami", propriétaire de l’hôtel Los Notros a créé un lieu enchanteur, en phase complète avec la nature, alors que ceux qui essaient mesquinement de l’imiter auraient, quant à eux, l’objectif de lancer une station de ski…
La population locale se bat pied à pied, et fait signer des pétitions aux touristes de passage.
Mais mon jules, qui ne comprend apparemment rien à la beauté de la nature sans les poteaux des téléfériques a une proposition bien à lui : pourquoi ne pas broyer un glacier qui ne sert à rien pour le mettre sur les pentes comme neige artificielle ?
Ils ne faudrait pas que ça parvienne aux oreilles des charmants entrepreneurs du projet de la station de ski, ils seraient capables de trouver l’idée bonne…
(je précise pour les amoureux de la nature qui auraient déjà dans l’idée de lyncher mon mari, que son propos était bien évidemment ironique, et qu’il est le papa de deux enfants en bas-âge…)
Le Perito Moreno, qui n’est donc heureusement pas pour l’instant au cœur d’une station de ski Patagonienne, se situe au sud du parc national "Los Glaciares".
Et au nord de ce parc, se trouve le Fitz Roy.
Alléchés par les très belles photos de Mr Boo, nous avons donc décidé d’aller y marcher un peu..
En Parisienne d’adoption que je suis, je demande à mon mec s’il vaut mieux emmener la poussette du dernier né.
En Parisien d’adoption qu’il est devenu, il me répond que pour le gravier, il vaut mieux des pneus tous terrains et que nous allons donc nous abstenir d’emporter ce moyen de locomotion infantile.
Innocents que nous sommes !
Il faut dire, à notre décharge, que nous nous sommes depuis un certain temps habitués au tourisme sur passerelle (voir ici et ici).
Nous partons donc en bus de bon matin et je commence à me méfier à l’arrêt obligatoire dans la mignonne chaumière des surveillants du parc.
Notre hôtesse, en sus des explications d’usage pour le trekking (eau, vêtements, respect des lieux…), nous explique qu’il n’est pas impossible de croiser un puma et que NORMALEMENT il a peur des hommes. Mais qu’il est ENVISAGEABLE que ce ne soit pas le cas (dans l’hypothèse, j’imagine, où ledit puma aurait particulièrement faim…) et que dans ce cas, il ne faut surtout pas prendre la fuite mais agiter les bras en criant.
Bien sûr. Oui.
Mais je ne suis pas aussi sûre, quant à moi, de mes réflexes face à un puma affamé…
A l’arrivée à El Chaltén, nous croisons un nombre impressionnant de vrais trekkeurs, dont la grande majorité parle français. La Patagonie est visiblement une destination à la mode au pays.
Nous autres, avec le bébé de onze kilos et le sac à langer de quinze tonnes, respectivement sur le dos et l’épaule, nous avons définitivement l’air de touristes.
Mais on ne se décourage pas, et après une délicieuse pizza dans un endroit appelé "Patagonicus", nous prenons la direction des pistes.
Ça grimpe.
Ça grimpe même fort, à mon avis.
Mon mec se traîne les quinze kilos du sac à langer (les couches ça pèse lourd de nos jours, c’est bourré de fonctions compliquées…) et j’ai le bébé sur le dos.
Il fait beau, il fait chaud et on s’arrête toutes les dix minutes pour refaire un lacet, râler (moi), gémir (notre fille), boire un peu d’eau (tous), replacer un sac…
"Bonjour, bonjour" s’entend-on dire en français dans le texte par les randonneurs qui nous dépassent avec facilité.
Un peu plus loin, on se retrouve à grimper une pente que j’estime horriblement raide, avec marches en caillasse trompeuses, vide dans le dos et chaîne en acier fixée dans la paroi rocheuse pour éviter les accidents que j’imagine facilement fatals.
A mi-chemin, prise de doute, je crie quelque chose comme « on va se rompre le cou sur ce sentier de m… !».
Mon héroïque mari, habitué à gérer mes émotions, ne faiblit pas et nous hisse tous en haut à la seule force du biceps… en haut, où une file de randonneurs d’un certain âge nous regardait déjà depuis un certain temps (priorité à celui qui est déjà engagé sur l’obstacle, j’imagine) et encouragent ma fille en français (bien sûr !) :
« Bientôt le sommet, courage ! »
On pourrait vraiment me souhaiter que ce voyage m’ait appris à fermer ma grande gueule…
Point de vue et retour, des randonneurs nous passent tous le mot (en français, toujours) qu’on a retrouvé la tétine du bébé et qu’on nous l’a accrochée en évidence sur un arbuste.
Les randonneurs sont sympas.
Pour une fois, une photo de moi : vous pourrez donc admirer mon cou de cygne (qui a dit "ou de tortue ?") et mon bébé "Indestructible" (voir l’article "Bilan des hostilités").
Et nous nous retrouvons au bout de trois heures d’efforts de retour à la Pizzeria "Patagonicus".
Ma fille de quatre ans me demande : « A quoi ça sert de monter sur une montagne s’il faut en redescendre ?».
Je lui parle de l’intérêt du dépassement de soi, de la force de l’exploit sportif puis en désespoir de cause, de la beauté de la vue. Mais je sens que je ne la convaincs pas : elle n’a pas aimé la vue…
Nous aurons donc passé la majorité de notre séjour à El Chaltén, dans le restaurant "Patagonicus".
Cadre très sympa, coca frais, délicieuse tarte au citron, bilan très positif.
La propriétaire, petite fille de l’alpiniste Cesare Fava, que nous croyions alors être le vainqueur du Fitz Roy – apparemment une montagne mythique pour les amateurs -, nous dédicace une carte postale.
J’apprends par la suite, via un ami de mon mari, que le vrai vainqueur du Fitz s’appelle Lionel Terray (un français, déjà !) et je découvre en googlant Monsieur Fava qu’il n’aurait "que" participé à la première ascension plus que contestée du Cerro Torre (le sommet juste à côté).
Ce n’est pas grave : la pizza était vraiment très bonne.
Sacrebleu mais il y a eu un temps magnifique et une vue d’enfer…
Savez vous que la tempête de ciel bleu avec cette vue la sur le Cerro tore ça arrive juste 10 ou 20% du temps?
@Siril : on sait qu’on a eu de la chance au Fitz !
Et nous n’avons pas eu non plus une goutte de pluie à Ushuaïa.
Pendant ce temps là, à Buenos-Aires, les inondations noyaient la voiture…