Hier soir, après sa merveilleuse première journée dans sa future ex-maternelle de Poissy, notre fille est partie se coucher.
Et alors qu’elle avait refusé obstinément de me dire le moindre mot sur ce qu’elle avait traversé pendant l’après midi, notre fille s’est réveillée en hurlant plusieurs fois cette nuit là, blanche comme un linge, claquant des dents et se plaignant de douleurs dans les jambes.
En état visible de choc.
Ce matin, elle ne voulait pas même pas sortir au parc avec son petit frère.
Je l’ai regardée dans les yeux et je lui ai dit : "tu es forte, tu ne pouvais rien faire face à deux "petites" filles beaucoup plus grandes que toi. C’était à un adulte d’intervenir. Ce n’est pas ta faute."
Et elle est partie au parc.
À mon mari, choqué et étonné par la violence de la réaction de notre enfant, je réponds : "et pourquoi en serait-il autrement ?
Pourquoi un enfant serait moins choqué qu’un grand par une telle situation d’impuissance et de violence ? C’est cette même impuissance qui est si difficile à gérer pour un adulte agressé dans la rue."
Ce sentiment de ne pas avoir pu se défendre, fût-ce en appelant à l’aide, et d’être à la merci d’autrui.
Un sentiment qui parfois laisse des séquelles telles que l’agoraphobie.
Oui, un enfant, c’est résilient (pour utiliser un vocable cher à Boris Cyrulnik, psy à la mode), oui ça sait rebondir. Mais un enfant sait justement le faire parce qu’il n’est pas encore alourdi par une accumulation d’épreuves.
Suprême paradoxe, donc, que d’amoindrir les déboires traversés par un petit par cette faculté à les traverser, alors même que cette faculté lui devient de moins en moins évidente.
On ne s’endurcit pas sans séquelles.
On ne rebondit pas sans traces sur le caoutchouc.
Et je ne crois pas que Maria Callas, un des exemples préférés de Cyrulnik pour étayer sa théorie, ait eu une vie heureuse.
Riche et célèbre, oui. Heureuse non. Et dans la mesure où la richesse et la célébrité ne sont le lot que de quelques uns, je crois quant à moi, qu’on devrait plus se concentrer sur le bonheur d’une majorité d’autres.
A Cyrulnik, inventeur de la résilience, je préfère mille fois Serge Tisseron qui explique que certaines personnes taxées de résilience lui font penser à des cocottes minutes, menant une vie apparemment normale mais dont les névroses, bien tenues sous leur couvercle, peuvent exploser à la moindre provocation.
J’ai une mère dans ce cas et je ne vous conseille pas de croiser sa route quand le couvercle glisse…
Se faire maltraiter, au dire de la surveillante de cette établissement scolaire, ferait partie "des joies de la collectivité".
Je ne souhaite pas connaître la collectivité de cette personne et d’ailleurs, certains proches m’ont déjà suggéré qu’elle pourrait bien être une femme battue. La violence engendre la violence. Parfois elle la justifie.
Il me semble au contraire qu’une collectivité heureuse implique le respect de soi et des autres. Et que c’est vers cet objectif que devrait tendre toute pédagogie. À plus forte raison dans une école.
Apprendre aux enfants à "se faire respecter", c’est à dire à se défendre, énorme nuance, cela s’appelle la collectivité de la loi de la jungle, de l’agression et de la contre-agression : dans la mesure où le respect de l’autre n’est pas acquis, il faut se battre pour se l’assurer.
Réflexe par trop commun de nos jours et que je constate régulièrement à Paris.
Bien sûr, j’ai appris à m’y défendre, je ne suis ni naïve, ni agoraphobe.
Mais ce n’est pas la communauté que je souhaite pour ma fille, ce n’est pas la communauté que je souhaite qu’on APPRENNE à nos enfants et j’espère que je ne suis pas la seule..
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