tu es sûre de toi…

« Mais pourquoi, mais comment ? »

« Comment être sûre de toi, tout en réfléchissant », tu me demandes de tes grands yeux ambrés de chat, lumineux et méfiants.

« Comment, quand je sais que je ne pourrai jamais atteindre vraiment ce que j’ai déjà imaginé, bâti et peaufiné dans ma tête depuis longtemps ? »

« Comment, quand ma soif de perfection m’assure d’ores et déjà que je serai de toute façon déçue par le résultat ? »

« Comment puis-je être sûre ? »

Et moi, qui te regarde et qui me reflète dans tes doutes, je voudrais tellement pourtant t’apprendre à avoir confiance, à oser, à t’élancer.

À battre de toute la force de tes ailes toutes neuves et à voler.

A dévorer cette vie qui s’offre aujourd’hui devant toi dans toute la nudité d’une page blanche avide de tout absorber.

Moi qui doute aussi de moi mais qui suis si sûre de toi pour nous deux.

Et je pense à cette citation si terrible de ce dialoguiste célèbre qui promet aux andouilles en mouvement d’aller toujours plus loin que ceux qui réfléchissent en restant collés sur leur séant.

Et je tremble pour toi d’une trop grande lucidité qui t’empêcherait finalement d’avancer.

Qu’en serait-il de tous tes dons si tu n’osais même pas les essayer ?

Avance, bouge, monte sur ce toit, chante et crie !


Et seulement après, s’il le faut vraiment, réfléchis.

Tu me regardes encore et je dessine…

Des maisons de paille, des bateaux, des arbres et des châteaux. Je te parle des étoiles, de l’importance des rêves et de la foi. En ses défauts et ses qualités, en la vie, en son destin. En tout, ou presque rien.

Je te dis qu’il faut essayer, se tromper, tomber, se gameller, essayer encore, et remarcher avant de finalement y arriver. Et que tout le long du chemin, surtout, il ne faut jamais cesser de rire et de s’amuser.

Sois sûre de toi, ma fille, car tu le mérites.

Car chaque petite fille porte en elle la graine d’un magnifique conte de fées. Et que chaque jour, il faut l’arroser d’un amour régulier. De soi, des autres et de l’univers tout entier.

Ah si tu savais ! Si tu savais…

Le monde n’attend qu’un petit signe de ta part avant d’ouvrir au plus grand ses bras et de se régaler de la chance inouïe de pouvoir t’embrasser.

Mais je vois l’ombre du doute, encore. Tâches moussues dans le doré de ta prunelle.

Alors je pense à toutes les fois où l’on t’a dit que tu étais timide. Quand tu te contentais d’osciller devant l’inconnu à peu près deux fois plus grand que toi.

« Elle est timide, la petite ! Ça lui passera ! »

Je pense aux cent quatre vingt centimètres de ce balourd de grande personne, perdus à présent dans la foule d’une réunion ou d’un cocktail à peu près mondain, la cacahuète dans la bouche et la coupe dans la main.

Le sourire devant, les peurs derrière.

Toutes les peurs. De la plus futile à la plus primaire.

Celle de ne connaître personne, celle de s’ennuyer, celle du vide, celle du noir, celle de ne pas être apprécié, de ne pas être à sa place, d’être enfin démasqué pour le foutu imposteur qu’on se sait être en réalité.

Je pense à cet homme-là. Et je le vois qui se répète en boucle comme un mantra :

« Tu es sûr de toi, tu es le meilleur, tu es sûr de toi, tu es le meilleur, tu es sûr de toi… ».

Tu veux être sûre de toi, mon bébé, ma fleur, mon enfant ?

Alors fais comme tout le monde, pour commencer. Avant de te lancer.
Fais semblant.

 

1 réponse sur “ tu es sûre de toi… ”
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