Pour fêter le passage au nouvel an, la tradition c’est de prendre des bonnes – et parfois brèves – nouvelles résolutions.
Pour rajouter du piment, cette année, après que le Jules se soit galamment dépatouillé avec les deux homards (il m’a d’ailleurs chargée de faire passer le message auprès de certains de ses amis comme quoi il ne déchiquetait plus le crustacé avec les dents), nous avons fait chacun notre petite liste de souhaits que nous aimerions voir réalisés par l’autre.
Plutôt, en effet que d’attendre et m’étioler avant de bénéficier d’une improbable surprise, j’ai décidé de prendre le taureau par les co… rnes et de dire franchement ce qui me ferait plaisir. Les mecs se plaignent en effet suffisamment souvent de notre langage féminin composé de sous-entendus, faux-sens et autres contre-sens menant rapidement au fatidique « il faut qu’on parle », pour que je décide pour une fois de m’exprimer clairement.
Et là, j’ai eu une révélation : si mon homme ne sait pas me faire de surprises en dehors des quelques fois où il a sorti son briquet pour allumer une bougie, ce n’est pas faute de mauvaise volonté, ce serait plutôt faute d’imagination. L’avantage pour moi, c’est que cette déficience lui permet de me tenir la main en avion pendant que je me fais des films catastrophe.
Recyclage de photo : un de mes probables derniers poulets.
Et pendant que je faisais ma petite liste de souhaits, ordonnée par ordre de priorité et faisabilité, avec annexes et rêves intégrés, allant de l’envoi de cartes postales ou de l’invention d’un cocktail à mon nom, au classique voyage à l’autre bout du monde, monsieur se triturait désespérément les méninges à la recherche d’un vœu qui ne se limite pas à la seule gâterie sexuelle.
En désespoir de cause, nous avons convenu ensemble que je ne pouvais rien lui proposer de plus, parce que j’étais déjà parfaite.
L’année commence bien !
Mais sur le front des résolutions, en dépit de ce constat de perfection, j’ai tout de même décidé d’étendre cette fois-ci le boycott de la viande aux succulentes volailles, mon ami le foie-gras malheureusement inclus.
Pour tout plein de raisons évidentes et d’autres plus obscures…
Parce que tout de même, après avoir arrêté de manger Babe le petit cochon sous prétexte que c’est mignon et que Clooney a un porc domestique, c’était pas gentil de continuer de manger Chicken Little en se consolant que c’est un volatile idiot qui a mérité son sort.
Parce qu’en termes écologiques, manger directement la pelouse, le maïs ou le grain, ou pour ceux qui n’aimeraient pas le gazon (il paraît qu’il y en a), manger ce qu’on pourrait planter à la place, c’est moins lourd sur la facture que de manger le plantigrade ou le palmipède qui l’a brouté et picoré.
Parce qu’on apprend régulièrement que l’animal en question n’a malheureusement pas mangé que du végétal et s’est fait piquouser avec des substances qui n’ont pas été prévues par la chaîne alimentaire classique.
Parce que spirituellement, il paraît que c’est mieux (on va voir si je lévite sans efforts dans quelques mois, ça ferait son petit effet à la sortie de l’école) et parce que je suis convaincue que c’est meilleur pour la santé et la beauté de la peau (et qu’il ne faudrait pas croire que je n’ai QUE des raisons altruistes pour motiver mon choix).
Parce que quand je dis que je n’aime pas la chasse et qu’on me demande si je mange de la viande pour me prendre en flagrant délit d’hypocrisie, à partir de maintenant je pourrai enfin répondre « eeeeeeeeeeeh non ! eeeeeeeeeeeh paf ! » alors que je suis absolument convaincue que la grande majorité des chasseurs ne mange pas ce qu’ils tuent parce qu’ils sont les premiers à savoir qu’ils ont truffé le gibier et les forêts de plomb et ne sont pas hyper tentés par la perspective de choper le saturnisme.
Aux mêmes qui me demanderont si je porte du cuir, à défaut de manger ce qu’il a emballé, je pourrai aussi préciser qu’à part un cacochyme blouson en peau d’une chèvre qui est sûrement morte de vieillesse, je ne me chausse qu’en toile depuis bien longtemps et en croslite. Ce qui est, en dépit de son nom, résolument dépourvu de toute trace d’alligator. Ceci dit, si j’en avais les moyens, et que je trouve ça joli, ce qui est loin d’être le cas, je ne serais pas du tout hostile à l’idée de me chausser en croco, mon respect de la vie ne s’étendant pas à un animal qui fait faisander ses proies dans la boue de son marigot pour lui donner du goût.
Et quand je dis que je n’aime pas les chasseurs, j’aimerais nuancer en précisant que j’ai plus d’affection pour une certaine catégorie de chasseurs : ceux qui respectent la nature, et l’animal qu’ils traquent dans le but légitime de le manger.
Le livre « King’s Oak » où un séduisant chasseur à demi nu traquait le cerf avec son carquois et le film « Le dernier des Mohicans » où Daniel Day-Lewis courait virilement sur ses mocassins et ses jambes musclées sont passés par là. Il y a des chasseurs qui émoustillent la femelle alpha tapie au fonds des bois et des inconscients.
Malheureusement, les quelques chasseurs que j’ai croisés dans nos campagnes, – tenue de camouflage pour se défendre de l’éventuelle et toujours probable riposte d’un lapin, bedaine systématique et tronche avinée majoritaire -, et les descriptions faites par ma sœur qui a défendu le phoque en baie de Somme, d’une haie compacte de chasseurs sur l’exacte ligne de démarcation du parc naturel se mettant à tirer simultanément le jour de l’ouverture de la chasse, lui faisant craindre un bref instant qu’on venait de déclarer une guerre, sont assez loin des fantasmes sylvestres de mon adolescence…
À la décharge des chasseurs, on peut toutefois leur reconnaître qu’ils sont des carnivores qui s’assument (dans l’hypothèse, toujours, où il souhaiteraient risquer le saturnisme). Si nous autres, les carnivores de supérette, devions tordre le cou de notre volaille avant de la plumer et de la consommer, on serait plus nombreux à se contenter de la salade.
Et donc, cette année, j’arrête le poulet.
Si j’en crois le Jules, je devrais aussi songer à arrêter le saumon, puisque l’eau pure des fjords, depuis qu’on y pratique l’élevage intensif, ne serait plus qu’un lointain souvenir en plus d’être un perfide argument commercial.
Et il faut aussi que j’envisage de ne plus manger de homard : ma tendre mais néanmoins virile moitié qui a dû écraser les carapaces et broyer les pattes à la pince de bricolage ce premier de l’an, s’est senti – je crois – un peu psychopathe et s’est juré de ne plus recommencer.
Les hommes ne sont décidément plus ce qu’ils furent et il va donc falloir, si je ne rencontre pas de Mohican qui voudrait bien de moi en seconde noce (hypothèse plus que probable si j’en crois le titre du film déjà cité), que je me renseigne sérieusement et urgemment sur les mille et une façons de mitonner la carotte…
Mais en attendant :
BONNE ANNÉE 2012
À TOUS ET MÊME AUX CHASSEURS (et que ceux d’entre vous qui traquent encore le cerf torse nu n’hésitent pas à me contacter)
ET LONGUE VIE AUX POULETS QUE JE NE VAIS PAS MANGER.
Y aurait-il une allusion à certaine ripaille à Dieppe en février 2002 ?
Ça va faire dix ans, il y a prescription.
Allez-vous aussi renoncer aux tripes de sanglier frites dans de la graisse d’urus ? Même avec du miel ?
Bonne et heureuse année 2012 !!!
@Michel ; en fait, JC et les enfants restent carnivores. Donc si JC me ramène un jour un sanglier de la chasse, je veux bien le lui cuisiner dans le miel 😉
Heureusement, l’hypothèse est assez improbable !