Au parc national "Tierra del Fuego", nous rencontrons à nouveau brièvement nos amies les passerelles… mais j’ai oublié de vous les prendre en photo !
Vue prise depuis la passerelle. Faites comme si vous ne voyiez pas la tâche.
Au fait, savez vous pourquoi la région s’appelle Terre de Feu ?
Tout simplement pour les lumières des feux de camps allumés par les autochtones et que voyaient les passagers des bateaux qui passaient le cap.
Vue prise depuis la même passerelle. Elle est en haut, à gauche. La tâche.
A propos des autochtones, les indiens Yamana, je dois préciser qu’ils n’ont malheureusement pas beaucoup survécu à l’admirable passage de notre si belle civilisation.
D’après notre guide en Terre de Feu, ils ont pourtant, dans un premier temps, très bien survécu aux Français qui se sont contentés de les observer vivre.
C’est grâce à ces Français, du reste, que l’on sait comment ils savaient supporter la morsure du froid et la constante humidité sans aucun vêtement sur eux. Vous vous imaginez, vous, tout nu dans une pirogue, dans un froid polaire (à entendre au sens propre) à chasser le pingouin (ou tout autre animal des environs) ? Mon mec connaît l’effet, lui qui s’est déjà roulé dans la neige dans le plus simple appareil une certaine nuit de nouvel an. Son truc à lui, c’était l’overdose de punch. Et le truc des Yamanas c’était le phoque. La graisse de phoque sur la peau et le steak de phoque dans l’estomac. Apparemment, il n’y aurait rien de tel pour vous fouetter le sang et vous remonter la température corporelle. À donner à réfléchir à ceux qui voudront convier mon tendre et imbibé époux à leur prochain réveillon.
Malheureusement, les Anglais qui ont suivi nos compatriotes sur ces terres australes (le "charmant" Darwin en tête), en voyant ces "malheureux", ignorants de l’existence du pudding et du tweed, ont cru de leur devoir de leur en apprendre les bienfaits…
Et une hécatombe s’en est suivi.
Le tweed ça mouille et un vêtement humide ça rend malade. Sans même parler du contact prolongé avec deux ou trois microbes occidentaux. Et le pudding – même de Noël -, n’a pas les mêmes effets calorifères que la graisse de phoque. Ça se saurait.
Je vais m’autoriser une minute d’humour noir bien charbonneux pour surmonter le pénible sentiment de tristesse que me donne chaque civilisation qui s’éteint.
Mais il faut quand même avouer qu’il faut être Anglais pour seulement songer à survivre à leur nourriture.
Et que cela me fait penser à un passage d’Astérix chez les Bretons (citation approximative puisque ma BD est restée en France) où un centurion hurle à ses sbires incompétents :
"Je vais vous faire cuire dans la sauce à la menthe et vous jeter aux fauves de l’arène !"
Et son adjoint décurion de marmonner :
"Pauvres bêtes !"
Pour revenir à un sujet plus léger, il y a dans la nature du sud de la Patagonie, un charmant volatile, le cauquén, dont le mâle a le cou tout blanc pour attirer les renards et les éloigner de sa femelle et de sa progéniture.
Un exemple pour nos fidèles amis les hommes, puisque cette imitation du canard est d’ores et déjà génétiquement disposée à se sacrifier pour sa famille.
C’est un mari fidèle, de surcroît ! Il paraît que si par erreur, un renard myope ou daltonien se mangeait plutôt la femelle, monsieur se laisserait littéralement mourir de chagrin. Certaines épouses de machos Argentins prétendent que l’oiseau, sans sa moitié, mourrait plutôt de faim…
Tss tss tss.
À ceux qui ne seraient pas familiarisés à mon sublime style photographique, je recommande l’article Paris-Le Mans-Dakar. Ici, avec la loupe, le cauquén.
Et là, le renard.
Vue prise depuis le train "Fin del mundo".
Le champignon llao llao qui a donné son nom au fameux palace de Bariloche.
Nous avons également effectué pendant notre séjour une brève excursion marine d’île en île. Île des loups de mer, Île des cormorans, île du phare des Éclaireurs plus communément appelé phare du bout du monde…
Le vent, là-bas, ne plaisante pas.
Cormorans.
Loups marins.
Loups marins.
Phare.
J’aime donner dans la légende lyrique…
Notre fille de quatre ans, qui possède, plus que sa mère en tout cas, cette admirable conscience comme quoi il lui faut gagner sa pitance, est partie tamponner les certificats nautiques des passagers avec la guide du bateau. Labeur qui lui aura permis de revenir avec une tranche de gâteau pour le goûter.
Allez savoir si ses parents y auraient pensé !
Ceci dit, il va falloir qu’on commence à négocier pour elle ses contrats de travail, même impromptus.
La journée précédente, pour calmer ses nerfs (et les nôtres) elle était déjà partie aider la femme de ménage de l’hôtel à faire les chambres.
Et n’y aura gagné qu’un seul savon gratuit !
Je suis sûre que vous penserez comme moi qu’il y a de l’abus dans l’exploitation…
A part ça, nous avons adoré Ushuaïa. Il paraît qu’il y pleut tout le temps mais nous n’y aurons pas vu une goutte de pluie (pendant qu’au même moment à Buenos-Aires…).
Et la lumière y est d’un bleu ! A vous rebaptiser celui de Delft.
Il paraît aussi qu’il n’y fait jamais plus de 18°C et que les bactéries ne pouvant y survivre, il n’y a aucune décomposition possible.
Les habitants, en tout cas, ne se laissent visiblement pas décomposer par le froid. Ils ont le même sang viking que mon haut-marnais de mari (cherchez l’erreur…). Avec quinze degrés sous le soleil, lui et eux étaient tous en tee-shirt.
Le tourisme y étant florissant, nous avons à nouveau beaucoup entendu parler en français (Nicolas Hulot devrait toucher des royalties, puisqu’il paraît qu’il n’en touche aucunes sur le shampoing…) et nous avons été surpris de tout payer plus cher qu’à Buenos Aires. Surtout les restaurants !
La spécialité locale, c’est le crabe mais aux français résidents en Argentine, je recommande le bistrot "El Almacen" : il est très pittoresque dans son imitation d’épicerie du début du siècle mais surtout, son chef est français et on y mange un mille-feuilles qui vous met la larme à l’œil tellement il rappelle le pays.
UshuaÏa est aussi un port touristique pour les gros bateaux de croisière. Vous avez vu le bleu ?
Mais c’est la fin de notre voyage déjà et nous voilà de retour pour la troisième fois dans un aéroport.
Notre bébé aura gentiment attendu le tout dernier moment et la file d’attente à l’embarquement pour hurler son mécontentement et sa fièvre. Et nous voilà, bagages en vrac, dans la foule des aspirants passager, à chercher – oserais-je dire "fébrilement" ? – le thermomètre.
Une adorable dame Brésilienne, pour distraire notre enfant de ses malheurs, lui improvise un spectacle avec les mains et se vautre littéralement dans un immense panneau en carton et métal pour finalement atterrir sur le pied d’un de nos nouveaux amis Suisses.
Merci madame pour la charitable intention !
Toute la file des futurs passagers retient le souffle et le charriot de bagages en nous priant de passer les premiers.
Et c’est une intention qu’aurait bien dû avoir une autre dame qui, plus loin et plus tard, a eu l’audace de passer devant mon mec et ma fille au détecteur de métal.
Ne jamais sous-estimer l’état de nerfs d’un papa après une semaine de vacances en famille et une maladie infantile de dernière minute.
Mon homme s’est littéralement défoulé sur l’innocente et, sous mes yeux incrédules, s’est mis positivement à lui hurler dessus (en français) :
"CONNASSE !! C’est pas possible une CONNASSE PAREILLE !" et autres invectives dans le même esprit.
Ma fille, sans nul doute émulée par l’exemple, quand l’austère policier, rangers et uniforme noir, lui demande de descendre de sa poussette pour passer sans roulettes sous le détecteur, elle lui a répondu (en espagnol cette fois, ma fille a le caractère bilingue…):
"No creo que lo voy a querer."
(Je ne crois pas que je vais vouloir.)
Je ne sais pas d’où ma fille tient son audace, ça doit lui venir de son anarchiste de père.
En digne petite fille de gendarme que je suis, j’ai dans le sang de foncer sous les meubles (à entendre au sens propre, les buffets bretons permettant ce genre de cascade) dès qu’un homme qui porte, a porté ou portera l’uniforme fait seulement mine de hausser le ton (ou le sourcil).
L’histoire s’est donc finie en pugilat, sous le regard que j’imagine atterré, de la brigade de fonctionnaires.
Mon mec soulève ma fille manu militari de sa poussette. Elle hurle (j’ai déjà dit, je crois qu’elle a une très jolie voix ?), regimbe et mord son père. Qui finit par lui taper sur les fesses.
J’imagine assez ce qu’a dû penser la police Argentine de ma famille de voyous…
Pour finir nos vacances en beauté, un dernier petit détail : lorsque nous sommes finalement arrivés chez nous, sous le coup des deux heures du matin, épuisés (tous) et fiévreux (le bébé), ce fut pour finalement découvrir que la voiture familiale de couleur rouge avait mariné en notre absence jusqu’au rétroviseur dans un délicieux bain d’égout. Et qu’elle était bonne pour le remorquage et le changement intégral de ses sièges, de l’électronique…
Il y avait eu des inondations à Buenos-Aires en notre absence et nous avons passé les heures suivantes, jusqu’à l’aube, en fait, à en réparer les dégâts les plus immédiats. Nettoyage des sièges enfants, documents de la boîte à gants à sécher, aération de l’appartement qui sentait le moisi…
Il faudrait des vacances pour se remettre des vacances.